"CIEL, CIEUX ou CIEUX n. m. est hérité (v. 881) du latin caelum [...] "voûte céleste, séjour de la divinité" et techniquement "voûte, voussure". L'origine du mot est incertaine ; on évoque un rattachement à caedere "couper" (césure), le ciel étant "découpé" en régions qu'observe la science des augures ou en zones que parcourent les astres. Le développement du pluriel caeli, d'origines biblique et chrétienne (rare auparavant), est fait sur l'hébreu chamayîm (pl.) ; Cf. le pluriel du grec ouranos (ouranien)."
"¤ Les trois sens du latin - "séjour de la divinité", "voûte céleste" et "plafond" - ont été repris en français. Le premier l'a été dans une perspective chrétienne, désignant, au singulier, et au pluriel cieux, le lieu de séjour de Dieu et des âmes après la mort, par opposition à terre ou à enfer [...]. ¤ Depuis 1050, le mot possède aussi le sens latin de "voûte céleste", à la fois dans une perspective cosmique, astrologique et au sens courant de "partie du ciel visible, limitée par l'horizon". [...]. [Ce mot] entre dans de nombreuses locutions où la référence atmosphérique n'est pas toujours affranchie de connotations cosmologiques et religieuses (ambiguïté que ne connaît pas l'anglais avec ses deux noms : sky, heaven)."
[...].
Dictionnaire historique de la langue française, sous la direction d'Alain Rey (nouvelle édition, 2010, Dictionnaires LE ROBERT).
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KOU : "Que dois-je entendre quand on me dit d'adorer le ciel (Chang-ti) ?"
CU-SU : "Ce n'est pas le ciel matériel que nous voyons ; car ce ciel n'est autre chose que l'air, et cet air est composé de toutes les exhalaisons de la terre. Ce serait une folie bien absurde d'adorer des vapeurs."
KOU : "Je n'en serais pourtant pas surpris. Il me semble que les hommes ont fait des folies encore plus grandes. [...]. Il y a tant de peuples qui adorent le ciel et les planètes !"
CU-SU : "Les planètes ne sont que des Terres comme la nôtre. La Lune, par exemple, ferait aussi bien d'adorer notre sable et notre boue, que nous de nous mettre à genoux devant le sable et la boue de la Lune."
KOU : "Que prétend-on quand on dit : le ciel et la Terre, monter au ciel, être digne du ciel ?"
CU-SU : "On dit une énorme sottise. Il n'a a point de ciel ; chaque planète est entourée de son atmosphère, comme d'une coque, et roule dans l'espace autour de son Soleil. Chaque Soleil est le centre de plusieurs planètes qui voyagent continuellement autour de lui : il n'y a ni haut, ni bas, ni montée, ni descente. Vous sentez que, si les habitants de la Lune disaient qu'on monte à la Terre, ils diraient une extravagance. Nous prononçons de même un mot qui n'a pas de sens, quand nous disons qu'il faut se rendre digne du ciel. C'est comme si nous disions : il faut se rendre digne de l'air, digne de la constellation du dragon, digne de l'espace."
"[...] il est beaucoup plus ridicule de dire le ciel et la Terre que de dire les montagnes et un grain de sable. Notre globe est infiniment moins qu'un grain de sable en comparaison de ces millions de milliards d'univers, parmi lesquels nous disparaissons. [...]."
CU-SU : "On nous a donc bien trompés quand on nous a dit que Fo était descendu chez nous du quatrième ciel et avait paru en éléphant blanc (1)."
KOU : "Ce sont des contes que les bonzes font aux enfants et aux vieilles [...]."
Voltaire : Dictionnaire philosophique (GF Flammarion, 2010) au mot Catéchisme chinois (2), pp. 144/146.
NOTES JMS :
Les notes ci-dessous ont été écrites en tenant compte de celles de Gerhardt Stenger qui a établi l'édition critique de la publication parue chez GF Flammarion.
(1) Fo est le nom chinois de Bouddha. Il aurait paru sous forme de singe, de dragon ou d'éléphant lors de ses prétendues réincarnations.
(2) Sous-titré : ou Entretien de Cu-su, disciple de Confutzée*, avec le prince Kou, fils du roi de Lou, tributaire de l'empereur chinois Gnenvan, 417 ans avant notre ère vulgaire. Traduit en latin par le Père Fouquet, ci-devant ex-jésuite. Le manuscrit est dans la bibliothèque du Vatican, numéro 42759.
* plus connu chez nous sous sa forme latinisée de Confucius. Il est, selon Voltaire, le philosophe laïque par excellence. Cu-su est son petit-fils.
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"Si un vers à soie donnait le nom de Ciel au petit duvet qui entoure sa coque, il raisonnerait aussi bien que le firent tous les Anciens, en donnant le nom de ciel à l'atmosphère, qui est, comme le dit très bien M. de Fontenelle dans ses Mondes (1), le duvet de notre coque."
"Les vapeurs qui sortent de nos mers et de notre terre, et qui forment les nuages, les météores et les tonnerres, furent pris d'abord pour la demeure des dieux. Les dieux descendent toujours sur des nuages d'or chez Homère ; c'est de là que les peintres les peignent encore aujourd'hui assis sur une nuée. [...]."
"Cette physique d'enfants et de vieilles était prodigieusement ancienne ; cependant il est très sûr que les Chaldéens avaient des idées aussi saines que nous de ce qu'on appelle le ciel. Ils plaçaient le Soleil au centre de notre monde planétaire, à peu près à la distance de notre globe que nous avons reconnue ; ils faisaient tourner la Terre et toutes les planètes autour de cet astre. C'est ce que nous apprend Aristarque de Samos (2). C'est le véritable système du monde que Copernic a renouvelé depuis ; mais les philosophes gardaient le secret pour eux afin [de] ne pas être persécutés."
"[...]."
Voltaire : Dictionnaire philosophique (GF Flammarion, 2010, au mot Le Ciel des Anciens, pp. 219/220.
NOTE JMS :
Les notes ci-dessous ont été écrites en tenant notamment compte de celles de Gerhard Stenger qui a établi l'édition critique de la publication parue chez GF Flammarion.
(1) Cf. l'ouvrage de Bernard Le Bovier de Fontenelle (1657-1757) : Entretiens sur la pluralité des mondes (1686). Cf. réédition récente : G-F Flammarion, 1998, p. 78.
(2) Aristarque de Samos (310- v. 230 av. J.-C.) est le premier astronome à avoir défendu la conception héliocentrique de l'univers (avec la Terre qui tourne sur elle-même et autour du Soleil) ; ce point de vue fut officiellement adopté par l'astronome babylonien Séleucos un siècle plus tard avant de tomber dans l'oubli.
Il inventa également une méthode permettant de calculer les distances relatives de la Terre à la Lune et au Soleil.
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"[A Alexandre le Grand (1), les Gaulois] répondirent qu'ils ne craignaient personne, qu'ils redoutaient seulement que le ciel ne tombe sur eux, mais qu'ils plaçaient l'amitié d'un homme tel que lui au-dessus de tout."
Ptolémée Sôter (2) : Histoire des guerres d'Alexandre
NOTES JMS :
(1) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_le_Grand et https://www.histoire-pour-tous.fr/biographies/1430-alexandre-le-grand.html
(2) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ptolémée_Ier et http://www.cosmovisions.com/Ptolemees.htm
SOURCE :
(1) Cité en exergue du chapitre 21 du livre de Jean-Louis Brunaux : Les Gaulois. Vérités et légendes, Ed. Perrin, 2018, p. 215*.
* En complément d'informations, je citerai ici la réponse de Jean-Louis Brunaux à la question que Cyprien Mycinski lui posa dans l'entretien paru dans le dossier sur les druides (revue HISTOIRE et civilisations n° 112, Le Monde/NATIONAL GEOGRAPHIC, fév. 2024, p. 39.
Voici donc :
- C. M. : "[...] qu'en est-il de la représentation que les druides se font du cosmos ? Craignaient-ils effectivement que le ciel leur tombe sur la tête ?"
- J.-L. B. : "Goscinny et Uderzo, les auteurs d'Astérix, étaint très bien renseignés, puisque cette peur existait bel et bien. On le sait grâce à une Histoire d'Alexandre le Grand rédigée par Ptolémée Sôter. Cet ouvrage évoque une rencontre qui eut lieu en 335 av. J.-C., dans le nord de la Grèce, entre Alexandre le Grand et une troupe de guerriers gaulois accompagnés par des druides. Au cours d'un banquet, le roi de Macédoine demanda aux Gaulois ce qu'ils craignaient le plus. Ils répondirent qu'ils ne redoutaient personne et avaient seulement peur que le ciel ne leur tombe sur la tête. Qu'on la tienne pour une forfanterie ou une superstition absurde, cette réponse a été tournée en ridicule. En vérité, elle renvoie à une croyance que les Gaulois partagaient avec d'autres peuples de l'Antiquité, dont certains Grecs. Dans leur esprit, la voûte céleste est une espèce de dais accroché à de gigantesques colonnes et suspendu au-dessus de l'univers. Le jour où l'immense tenture du ciel s'effondrera, ce sera la fin du monde. [...]."
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"Les Celtes (1) ont une haute stature, et un grand caractère ; ils venaient rechercher l'amitié d'Alexandre (2). La foi fut donnée et reçue. Alexandre demanda aux Celtes ce qu'ils craignaient le plus au monde, persuadé que son nom s'étendait dans leur contrée et au-delà, et qu'il était pour eux l'objet le plus redoutable. Il fut déçu dans cette pensée : en effet, habitant des lieux d'un accès difficile, éloignés d'Alexandre qui tournait ailleurs l'effort de ses armes, ils répondirent qu'ils ne craignaient que la chute du ciel. Alexandre les congédia en leur donnant les titres d'amis et d'alliés, et se contenta d'ajouter : "Les Celtes sont fiers."
Arrien : Histoire d'Alexandre : L'anabase d'Alexandre le Grand et l'Inde, trad. par Pierre Savinel, postface par Pierre Vidal-Naquet, Les Editions de Minuit, col. "Arguments", 1984, 384 p. (3)
NOTES JMS :
(1) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Celtes ; https://fr.wikipedia.org/wiki/Gaule_celtique ;
https://www.histoire-pour-tous.fr/histoire-de-france/5612-les-celtes-et-la-gaule-celtique.html ;
https://www.persee.fr/doc/bmsap_0301-8644_1873_num_8_1_2961 ; https://www.persee.fr/doc/bmsap_0301-8644_1873_num_8_1_2961
et https://www.persee.fr/doc/bmsap_0301-8644_1864_num_5_1_6685
(2) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_le_Grand et https://www.histoire-pour-tous.fr/biographies/1430-alexandre-le-grand.html
(3) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Anabase_(Arrien) ;
et à propos du mot "anabase", cf. not. : https://www.cnrtl.fr/definition/anabase ;
https://www.lalanguefrancaise.com/dictionnaire/definition/anabase ; https://fr.wikipedia.org/wiki/Anabase
et https://fr.wiktionary.org/wiki/anabase
SOURCE :
Extrait cité dans : https://oparleur.fr/le-ciel-nous-tombe-sur-la-tete