"Les protestants, et surtout les philosophes protestants, regardent la transsubstantiation (1) comme le dernier terme de l'impudence des moines et de l'imbécilité des laïques. [...]. Non seulement un dieu dans un pain, mais un dieu à la place du pain ; [...] ; du vin changé en sang, et qui a le goût du vin ; du pain qui est changé en chair et en fibres, et qui a le goût du pain. [...]."
"Leur horreur augmente quand on leur dit qu'on voit tous les jours, dans les pays catholiques, des prêtres, des moines qui, sortant d'un lit incestueux, et n'ayant pas encore lavé leurs mains souillées d'impuretés [...] mangent et boivent leur dieu, chient et pissent leur dieu (2). Mais quand ils réfléchissent que cette superstition, cent fois plus absurde et plus sacrilège que toutes celles des Egyptiens, a valu à un prêtre italien quinze à vingt millions de rente, et la domination d'un pays de cent milles d'étendue en long et en large, ils voudraient tous aller, à main armée, chasser ce prêtre qui s'est emparé du palais des Césars. Je ne sais si je serai du voyage, car j'aime la paix ; mais quand ils seront établis à Rome, j'irai sûrement leur rendre visite."
Voltaire : Dictionnaire philosophique (GF Flammarion, 2010) au mot transsubstantiation, pp. 513/514.
NOTES JMS :
(1) Cf. également : https://jmsauvage.fr/dictionnaire-des-citations/sang
(2) Voltaire rejoint ici la doctrine des stercoranistes*, membres d'une secte qui croyaient "que les espèce de l'Eucharistie étaient digérées comme d'autres aliments" [Dictionnaire de la langue française en quatre volumes, de Paul-Emile Littré (édité par Encycopaedia Britannica, 1982)].
* en latin stercus, oris signifie notamment excrément.
Cf. not. : https://en.wikipedia.org/wiki/Stercoranism et https://fr.wiktionary.org/wiki/stercoranisme