chat

"Un chat, c'est l'ensorcellement même, le tact en ondes...", notait Céline. Et Bébert, énorme matou tigré au maintien aristocratique et à l'intelligence prodigieuse, glouton et râleur, mais toujours d'une "fidélité de fauve", n'était pas, qui plus est, un chat ordinaire."

"Abandonné par son premier maître, l'acteur de cinéma Le Vigan (1), longtemps vagabond dans Montmartre au temps de l'Occupation, il avait été recueilli par Céline et sa femme, et partageait leurs errances, leurs aventures, leur misère, leur exil. "Il se rendait compte de la tragédie." On comprend que Céline en est fait l'un de ces héros de ces derniers romans (2) - ces chroniques hallucinées de l'Allemagne de la débâcle -, et l'un des chats les plus célèbres de la littérature."

"Oui, Bébert a bien  tenu ce rôle de "Français à part entière" dont parlait Roger Nimier. Et plus encore, il a servi de révélateur pour l'écrivain quand il ne figurait pas tout simplement pour lui un modèle ou un miroir."

"L'aventure du chat renvoie donc aux derniers romans de Céline, et ceux-ci projettent désormais une image quasi mythique de l'animal."

"Ce livre - entre la biographie et l'essai - est au fond l'histoire d'une double fascination."

Présentation par Frédéric Vitoux (3) de son livre : Bébert, le chat de Louis-Ferdinand Céline (Ed. Grasset, sept. 1976, 184 p.).

NOTE JMS :

(1) Robert Le Vigan est le nom de scène de Robert-Charles-Alexandre Coquillaud (1900-1972). Ayant adhéré en 1943 au PPF de Jacques Doriot, il rejoint Céline à Sigmaringen en 1944 pour tenter d'échapper à l'Epuration. Mais il est condamné à la dégradation nationale pour son implication dans la Collaboration, ainsi qu'à dix ans de travaux forcés. Relâché trois ans plus tard sur parole, il s'exile en Argentine en passant par l'Espagne. Il y mourra dans la misère.

(2) Féérie pour une autre fois (1952), Normance : Féérie pour une autre fois II (1954), D'un château l'autre (1957), Nord (1960) et Rigodon (1969).

(3) Frédéric Vitoux est né en 1944. En 1968, il a soutenu une thèse de doctorat de 3ème cycle sur Céline, thèse qui, remaniée, sera publiée en 1973 chez Gallimard sous le titre : Louis-Ferdinand Céline Misère et parole. Elu à l'Académie française en 2001.