philistin

"Le philistin (1), un homme sans besoins intellectuels, [...] ignore les jouissances intellectuelles. [...]. Aucun élan vers la connaissance et la compréhension en elles-mêmes n'anime son existence, pas d'élan non plus vers des jouissances esthétiques proprement dites qui, en tant que tel, est parfaitement apparenté au premier. Les jouissances de cette sorte que le monde ou quelque autorité lui imposent parfois, il glissera dessus brièvement comme sur une sorte de travail forcé. Les seules vraies jouissances sont pour lui d'ordre sensible : grâce à elles, il se rattrape. C'est pourquoi huîtres et champagne sont le sommet de son existence."

Arthur Schopenhauer : Die Kunst zu beleidigen, Verlag C. H. Beck, oHG, München, 2002 (L'art de l'insulte, Ed. du Seuil, 2004, pour la trad. française par Eliane Kaufholz-Messmer, p. 29).

NOTE JMS :

(1) Dans LE ROBERT. Dictionnaire historique de la langue française [(sous la dir. d'Alain Rey), Dictionnaires LE ROBERT, Paris, 1992], on peut lire, au sujet du mot philistin :

"n. et adj. est un emploi spécial, comme nom commun (1828), du nom ethnique Philistin (attesté v. 1190), emprunté au latin chrétien Philistinus qui [renvoie lui-même en hébreu au] nom d'un peuple de Palestine ennemi des Israélites. Le français a emprunté le sens figuré à l'allemand Philister, correspondant de Philistin, qui, parmi les étudiants en théologie, a pris à la fin du XVIIe s. le sens de "bourgeois, ennemi des étudiants et de ceux qui se consacrent aux choses de l'esprit", de même que les Philistins étaient les ennemis du peuple élu. De là, au XVIIIe s., l'emploi pour "personne à l'esprit borné"."

"¤ Le mot est cité en 1828 dans la Revue Britannique comme nom  donné aux étudiants allemands aux bourgeois. Il est acclimaté depuis 1832, employé surtout par les romantiques pour désigner les bourgeois, les marchands qu'ils considèrent comme fermés aux choses de l'esprit, avec une valeur assez voisine de celle de béotien."

"On en a tiré PHILISTINISME n. m. (1851), mot d'usage littéraire pour désigner le caractère, l'attitude, les conceptions du philistin."

Dans le dictionnaire encyclopédique alpha (Ed. GRAMMONT S. A., 1982), on peut lire, du point de vue historique, les précisions suivantes :

"Peuple de l'Antiquité auquel la Palestine doit son nom. Probablement venu de Crète, les Philistins faisaient partie de la deuxième vague des Peuples de la mer qui tentèrent d'envahir l'Egypte sous Ramsès III. Ils s'établirent peu après sur le littoral de Canaan, où ils fondèrent une confédération de cinq villes ou pentapole (Gaza, Ascalon, Asdod, Gat et Eqron ou Accaron). Ils se heurtèrent bientôt aux Hébreux et, selon l'Ancien Testament, il fallut près de deux siècles au peuple élu pour venir à bout de ces rudes guerriers. Au VIIIe s. av. J.-C., les Philistins passèrent sous la domination des Assyriens, puis des Néo-Babyloniens et enfin des Perses."