SCUM

"Si toutes les femmes laissaient tomber les hommes, tout simplement, le gouvernement et l'économie nationale s'effondreraient. Même sans les laisser tomber, les femmes, une fois conscientes de l'étendue de leur supériorité et de leur pouvoir sur les hommes, pourraient devenir maîtresses de tout en quelques semaines et parvenir à l'assujettissement total des hommes. Dans une société saine, l'homme trottinerait docilement derrière la femme. L'homme est un être obéissant, il se plie facilement au joug de toute femme qui veut bien essayer de le dominer. Les hommes, en fait, désirent désespérément se soumettre aux femmes, être sous la conduite de leur Mamma et s'abandonner à ses soins. Mais cette société n'est pas saine et la plupart des femmes n'ont pas la plus faible idée de ce qu'est le véritable rapport des forces."

"Le conflit ne se situe donc pas entre les hommes et les femmes, mais entre les Scum (1) - les femmes dominatrices, à l'aise, sûres d'elles, méchantes, violentes, égoïstes, indépendantes, fières, aventureuses, sans gêne, arrogantes, qui se considèrent aptes à gouverner l'univers, qui ont bourlingué jusqu'aux limites de cette société et sont prêtes à se déchaîner bien au-delà, et les Filles à son Papa, gentilles, passives, consentantes, "cultivées", subjuguées, dépendantes, apeurées, ternes, angoissées, avides d'approbation, déconcertées par l'inconnu, qui préfèrent croupir dans le purin (là au moins le paysage est familier), s'accrocher aux singes, sentir Papa derrière et se reposer sur ses gros biceps, qui ont besoin de voir une grosse face poilue à la Maison Blanche, trop lâches pour regarder en face l'hideuse réalité de l'homme, de Papa, qui ont établi leurs quartiers une fois pour toute dans l'auge à cochons, se sont adaptées à l'animalité qu'on attend d'elles, y trouvent un confort superficiel et ne connaissent pas d'autre mode de vie, ont rabaissé leur esprit, leurs pensées et leurs perception au niveau du mâle ; qui, dépourvue de jugement, d'imagination et d'humour, ne peuvent gagner la considération que dans une société masculine, qui ne peuvent se faire une place au soleil, ou plutôt dans le fumier, que comme pondeuses et repos du guerrier, compresse d'ego et tétines roboratives ; qui négligées par les autres femmes, projettent leurs tares, leur masculinité, sur toutes les femmes et considèrent les femmes comme des vers de terre."

Valérie Solanas : SCUM manifesto association pour tailler les hommes en pièces, Ed. Mille et une nuits, col. "Les Petits Libres", mai 1998, pp. 49/50.

NOTE JMS :

(1) SCUM est l'acronyme de Society for Cutting Up Men. Cut up signifie "découpage", "dépècement" et le mot scum signifie, quant à lui, "écume", "mousse", "scories", "crasse", "rebut", "excrément".