"Quand j'étais passé sous le bandeau, on m'avait interrogé sur mon amour pour Sade. Non pas parce que c'était le libertinage [...] de Sade ou la partouze, et ainsi de suite, mais c'est parce qu'y'avait l'idée du mal [...] et que sa propre liberté n'est pas arrêtée par celle des autres, elle pouvait empiéter sur celle des autres. [...]. Et donc quelqu'un qui serait traversé de façon automatique ou par conviction par des pulsions mauvaises ne peut pas être initiable."
Emmanuel Pierrat (1)
in Mes questions sur... La franc-maçonnerie, de Serge Moati et Alice Cohen (France, 2014).
NOTE JMS :
(1) Emmanuel Pierrat est né en 1968. Il est avocat, éditeur, romancier, traducteur, essayiste et franc-maçon. Il est également président du prix Sade, prix littéraire français créé en 2001 par Lionel Aracil et Frédéric Beigbeder en hommage au Marquis (ont notamment participé à ce jury Catherine Breillat, Catherine Millet et Catherine Robbe-Grillet).
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Testament de D.A.F. Sade, avant-dernier paragraphe :
"Cinquièmement, enfin : Je défends absolument que mon corps soit ouvert sous quelque prétexte que ce puisse être ; je demande avec la plus vive instance qu'il soit gardé quarante-huit heures dans la chambre ou je décéderai, placé dans une bierre de bois qui ne sera clouée qu'au bout des quarante-huit heures prescrites ci-dessus, à l'expiration desquelles la dite bierre sera clouée. Pendant cette intervalle il sera envoyé un exprès au sieur Le Normand, marchand de bois, boulevard de l'Egalité, numéro cent un, à Versailles, pour le prier de venir lui-même, suivi d'une charette, chercher mon corps pour être transporté sous son escorte et dans ladite charette au bois de ma terre de la Malmaison, commune d'Emancé, près Epernon, où je veux qu'il soit placé, sans aucune espèce de cérémonie, dans le premier taillis fourré qui se trouve à droite dans ledit bois en y entrant du côté de l'ancien château par la grande allée qui le partage. La fosse pratiquée dans ce taillis sera ouverte par le fermier de la Malmaison sous l'inspection de Monsieur Le Normand qui ne quittera mon corps qu'après l'avoir placé dans ladite fosse ; il pourra se faire accompagner dans cette cérémonie, s'il le veut, par ceux de mes parents ou amis qui, sans aucune espèce d'appareil, auront bien voulu me donner cette dernière marque d'attachement. La fosse, une fois recouverte, il sera semé dessus des glands, afin que par la suite le terrain de ladite fosse se trouvant regarni, et le taillis se retrouvant fourré comme il l'était auparavant, les traces de ma tombe disparaissent de la surface de la terre comme je me flatte que ma mémoire s'effacera de l'esprit des hommes, excepté néanmoins du petit nombre de ceux qui ont voulu m'aimer jusqu'au dernier moment et dont j'emporte un bien doux souvenir au tombeau."
SOURCE :
D.A.F. de Sade : Ceci est mon testament, Ed. Calligrammes, Quimper, 1987
JMS : REMARQUES :
A. Dans son texte de présentation de l'ouvrage précité, Jean-Pierre Guillon nous apprend qu'il ne fut tenu aucunement compte des dernières volontés du marquis et qu'il eut droit à une cérémonie bien religieuse organisée par ceux qu'il appelait lui-même la "racaille tonsurée".
B. Rappel chronologique :
- 2 décembre 1814, vers dix heures du soir, décès de D.A.F. de Sade ;
- 14 décembre, à une heure de l'après-midi, soit douze jours après sa disparition, depôt au Tribunal civil de première instance par Maître Finot, notaire du marquis, du testament. Celui-ci y fut décacheté, lu et décrit par le menu.
- 2 janvier 1815, inventaire après décès, en présence de son fils, à Charenton.
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"Dans le champ du langage, la dénotation n'est atteinte réellement que par le langage sexuel de Sade (1) ; ailleurs, ce n'est qu'un artefact linguistique [...].
Roland Barthes : Roland Barthes par Roland Barthes, Ed. du Seuil, col. "écrivains de toujours", 1975, p. 67.
(1) Cf. Roland Barthes : Sade, Fourier, Loyola, Points/Seuil, col. "essais", 1980, p. 137.