propriété

"Une des bases de la société. Plus sacrée que la religion."

Gustave Flaubert : Le Dictionnaire des idées reçues, Le Castor Astral, col. "Les Inattendus", 2015.

__________________________________________________

"On a l'habitude de regarder la propriété comme un pouvoir absolu sur les choses."

Sarah Vanuxem (1)

NOTE JMS :

(1) Sarah Vanuxem est maîtresse de conférences en droit privé à l'université de Nice Sophia-Antipolis. Elle a co-dirigé avec Caroline Guibet Lafaye (directrice de recherche au CNRS) un ouvrage intitulé Repenser la propriété, un essai de politique écologique [aux P.U.A.M. (Presses Universitaires d'Aix-Marseille), col. "Droit(s) de l'environnement", oct. 2015, 190 p.].

SOURCE :

Télérama n° 3562 du 21 au 27 avril 2018, rubrique "Penser autrement", p. 37.

__________________________________________________

"PROPRIETE. Possession de biens, expression des rapports de richesses dans la société. Selon la théorie marxiste-léniniste, la propriété est déterminée par le mode de production qui varie avec l'histoire. La propriété revêt donc aussi un caractère historique. A l'opposé des doctrines bourgeoises qui prétendent que la privée est un principe éternel et immuable, le marxisme-léninisme a prouvé que la propriété privée des moyens de production n'apparaît qu'à une étape déterminée du développement social. Les formes de la propriété changent à chaque nouvelle étape historique. Dans la commune primitive les rapports de production avaient pour base la propriété collective. Avec l'esclavage, les rapports de production ont pour base la propriété du maître d'esclaves, auquel appartiennent et les moyens de production et le travailleur lui-même, l'esclave, qu'il peut acheter, vendre ou tuer. Dans le régime féodal, les rapports de production sont fondés sur la propriété du seigneur qui détient les moyens de production, et son droit de propriété limitée sur le travailleur, le serf (1), qu'il ne peut plus tuer, mais qu'il peut vendre ou acheter. La propriété féodale coexistait avec la propriété individuelle du paysan et de l'artisan sur leurs instruments de production et sur leur exploitation privée, - propriété fondée sur leur travail personnel. Avec le capitalisme, c'est la propriété capitaliste des moyens de production qui forme la base des rapports de production : le droit de propriété sur les producteurs, les ouvriers salariés, n'existe plus ; le capitaliste ne peut ni les tuer ni les vendre, car ils sont affranchis de toute servitude personnelle ; mais ils sont privés des moyens de production et pour ne pas mourir de faim ils doivent vendre leur force de travail au capitaliste et subir le joug de l'exploitation."

"En régime socialiste, la propriété collective des moyens de production constitue la base des rapports de production. Il n'y a plus ni exploiteurs ni exploités. La victoire de la propriété socialiste en U.R.S.S. a trouvé son expression législative dans la Constitution de l'U.R.S.S. La propriété collective, socialiste, des moyens de production, sous les formes de la propriété d'Etat et de la propriété coopérative kolkhozienne, constitue la base intangible du régime socialiste."

Petit dictionnaire philosophique, sous la direction de M. Rosentahl et P. Ioudine, Editions en langues étrangères, Moscou, 1955, p. 501.

NOTES JMS :

(1) Cf. not. : https://www.cnrtl.fr/definition/servage ; https://www.lalanguefrancaise.com/dictionnaire/definition/servage 

et https://fr.wikipedia.org/wiki/Servage

(2) Cf. not. : https://www.cnrtl.fr/definition/kolkhoze ; https://www.lalanguefrancaise.com/dictionnaire/definition/kolkhoze ;

https://fr.wiktionary.org/wiki/kolkhoze et https://fr.wikipedia.org/wiki/Kolkhoze

__________________________________________________

"La propriété, c'est le vol !" (1)

Pierre-Joseph Proudhon (2) : Qu'est-ce que la propriété ? (1840) (3)

NOTES JMS :

(1) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/La_propriété,_c'est_le_vol_!

(2) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre-Joseph_Proudhon ; https://www.babelio.com/auteur/Pierre-Joseph-Prouhon/10165 :

http://sos.philosophie.free.fr/proudhon.php ; http://www.alternativelibertaire.org/Proudhon-fondateur-de-l-anarchisme ;

https://maitron.fr/spip.php?article36613 et https://www.cairn.info/revue-humanisme-2009-2-page-87.htm

(3) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Qu'est-ce_que_la_propriété_%3F et https://www.babelio.com/livres/Proudhon-Quest-ce-que-la-propriete-/153966

SOURCE :

Les grandes expressions philosophiques, Hors-série Le Point, nov.-déc. 2017, p. 152.

------------------------------

"La propriété, c'est la liberté !" (1)

Pierre-Joseph Proudhon : Confessions d'un révolutionnaire pour servir à l'histoire de la Révolution de Février (Paris, 1849) (2)

not. in : https://www.dicocitations.com/citations/citation-157683.php

NOTES :

(1) Cf. not. : https://journals.openedition.org/crdf/8369 et https://www.panarchy.org/proudhon/propriete.html

(2) Cf. not. : https://www.babelio.com/auteurs/Proudhon-Les-confessions-dun-revolutionnaire/576232 ;

en ce qui concerne la révolution de Février, cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Révolution_française_de_1848   

__________________________________________________

"On peut mal connaître l'oeuvre de l'intellectuel français du XIXe s. Pierre-Joseph Proudhon et avoir en tête l'une de ses plus célèbres phrases : "La propriété, c'est le vol !". De la part de ce précurseur de l'anarchisme, cela ne surprend pas. Sauf que, 26 ans plus tard, le même écrit : "La propriété, c'est la liberté !" (1)."

Alors, contradictoires ces deux phrases ? 

"Elles montrent en tout cas qu'il est difficile de circonscrire ce mot. [...]."

William Irigoyen (2) : présentation sur Arte de la série documentaire de Gérard Mordillat, Christophe Clerc et Bertrand Rothé : Le Monde et sa propriété (France, 2022, 4x52mn).

NOTES JMS :

(1) Mais si l'on se réfère aux dates de l'entrée ci-dessus, il s'agit non pas de 26 ans plus tard, mais de 9 ans !

(2) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/William_Irigoyen

__________________________________________________

"On peut comparer ces deux citations de Proudhon : "La propriété, c'est le vol !" et "La propriété, c'est la liberté !" sous deux angles différents. D'un côté, on obtient la propriété en prenant quelque chose à quelqu'un d'autre, donc c'est du vol, parce que ce bien n'est pas à vous et vous n'avez donc pas le droit de l'avoir. D'un autre côté, vous pouvez obtenir de la propriété en travaillant de manière légale, et ainsi obtenir des ressources qui vous permettent de vivre sans dépendre des autres. Dans ce cas, la propriété devient une liberté."

"Il y a une contradiction entre les deux citations, mais cette contradiction reflète la contradiction de la nature même du concept de propriété."

Andreas Rahmatian, juriste, Université de Glasgow : intervention dans le premier documentaire de la série documentaire mentionnée dans l'entrée ci-dessus.

__________________________________________________

"Je ne pense pas qu'il y ait une définition universelle de la propriété. Chaque société produit sa définition de la propriété au sens où la propriété c'est la relation d'appartenance entre des personnes relativement aux choses dont elles disposent. Voilà. Donc, une fois qu'on a dit ça, on peut faire ce qu'on veut de la propriété. On peut avoir une conception collective, socialiste, une conception fonction sociale, c'est-à-dire privée mais avec le souci de l'intérêt général, ou une conception très égoïste comme la propriété souveraine. Voilà, on pourrait... et certainement qu'il y en a plein d'autres."

Jean-Pascal Chazal, juriste, Sciences po, Paris (1) : idem référence de l'intervention ci-dessus.

NOTE JMS :

(1) Cf. not. : https://www.sciencespo.fr/ecole-de-droit/fr/profile/chazal-jean-pascal.html

__________________________________________________

"Ce n'est pas seulement que la propriété change avec le temps, le concept de propriété n'a pas toujours existé. [...]."

Eva von Redecker, philosophe, Université de Bologne (1) : idem référence de l'intervention ci-dessus.

NOTE JMS : 

(1) Cf. not. : http://fr.wikipedia.org/wiki/Eva_von_Redecker

__________________________________________________

"La propriété est un langage. C'est pas théorisé comme ça par tout le monde. [...] y'a beaucoup de gens que c'est vraiment quelque chose, une essence, [...] une notion avec un sens stable et fixe, et de manière très métaphysique, avec des attributs substantiels, la perpétuité, l'exclusivité, le caractère absolu, le caractère subjectif. Y'a des gens qui pensent que c'est une fonction et qui ensuite d'écharpent pour savoir laquelle d'ailleurs, parce que à quoi ça sert la propriété, c'est pas simple [...]. Dès qu'on rentre un petit peu dans la dimension soit technique, juridique, soit économique, etc. [...], ce sont les spécialistes qui se mettent à parler, et là y se mettent à parler un certain vocabulaire avec une certaine grammaire [...] : on s'met à parler de prescription acquisitive (1), de droit réel (2), de droit personnel (3), d'usufruit (4), et en fait c'est ça la propriété. La propriété, c'est tous les arguments qu'on peut faire à propos de c'qu'on associe au mot "propriété", et donc, c'est un langage, plus précisément un langage dans le langage."

"Et alors, qu'est-ce que ça implique de définir la propriété autrement que comme ça. Ben ça implique que, comme tout langage, on peut tout dire. On ne peut pas le dire n'importe comment, mais on peut tout dire. On peut dire l'exclusion, mais on peut dire l'inclusion, on peut dire l'accaparement privé, mais on peut dire la coopération collective ; on peut dire la communauté. On peut tout dire dans la langue de la propriété. Et ça, c'est l'intérêt. C'est qu'ça évite de fétichiser (5), dans un sens ou dans un autre, si j'ose dire : ça évite par exemple d'en faire un grand démon où la propriété privée serait la propriété absolue, subjective, etc. et trouver ça soit formidable, soit épouvantable, et c'qui revient un peu au même quand même à la fin. Simplement, ça ouvre le terrain de jeu, et donc ça permet de dire : "Qu'est-ce que j'ai envie de dire dans le domaine de la proprité, et surtout qu'est-ce que la réalité du droit en vigueur me dit, sans l'étroitesse d'une définition préalable."

Mikhaïl Xifaras, juriste, New York University, Abu Dhabi (6). Idem référence de l'intervention ci-dessus, 4ème documentaire.

NOTES JMS :

(1) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Prescription_acquisitive

(2) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_réel

(3) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_personnel

(4) Cf. not. : https://www.cnrtl.fr/definition/usufruit ; https://www.lalanguefrancaise.com/dictionnaire/definition/usufruit ;

https://fr.wikipedia.org/wiki/Usufruit et https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/usufruit.php

(5) Cf. not. : https://www.cnrtl.fr/definition/fetichisation et https://www.lalanguefrancaise.com/dictionnaire/definition/fetichisation

(6) Cf. not. : https://www.sciencespo.fr/ecole-de-droit/fr/profile/xifaras-mikhail.html ; https://www.theses.fr/059812427

et https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/entendez-vous-l-eco/les-communs-contre-la-propriete-privee-7699490

__________________________________________________

"Le premier qui, ayant enclos un terrain, s'avisa de dire : "Ceci est à moi", & trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères & d'horreurs n'eût point épargnés au Genre-humain celui qui arrachant les pieux, eût crié à ses semblables : Gardez-vous d'écouter cet imposteur ; Vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous ; & que la Terre n'est à personne. [...]."

Jean-Jacques Rousseau : Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes (1).

Extrait lu en voix off dans le premier documentaire de la série documentaire mentionnée ci-dessus.

NOTE JMS :

(1) Cf. not. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Discours_sur_l'origine_et_les_fondements_de_l'inégalité_parmi_les_hommes

et https://www.rousseauonline.ch/pdf/rousseauonline-0002.pdf